L’AVIS DU LIBRAIRE

 

Le seul manuscrit complet connu du Cimetière marin encore en main privée

VALÉRY (Paul)

Le Cimetière marin

s.d.

Manuscrit autographe de 9 pp., rédigé au recto de feuillets volants de papier vélin au format in-4 (20 x 16 cm), montés sous portefeuille en leporello, étui-chemise (Atelier Devauchelle)

Manuscrit autographe, de travail, complet, du grand poème de Valéry, son chef-d’œuvre poétique.

Rédigé avec soin, à l’encre bleu nuit au recto de feuillets de papier vélin, avec des ratures et corrections à l’encre, et des annotations et corrections au crayon, qui témoignent notamment des hésitations de Valéry dans la succession des strophes, et présentent des variantes par rapport à la version publiée.

Il est paginé de [1] à 7, avec 2 feuillets 5, et un feuillet non chiffré et présente l'intégralité des vingt-quatre strophes du poème (les strophes 16, 19 et 21 apparaissant en double).

Nous suivons ci-dessous l’ordre définitif des strophes, et n’indiquons que les principales variantes.

Le premier feuillet contient les 3 premières strophes, avec le célèbre incipit: « Ce toit tranquille, où marchent des colombes, Entre les pins palpite, entre les tombes… ». Le début du 3e vers de la strophe 3 présente une variante : « Parmi les pins », qui sera modifié en « Eau sourcilleuse » dans l’édition. Les chiffres 3 et 2 en marge au crayon des strophes 2 et 3 indiquent que Valéry avait songé à les inverser.

Le feuillet 2 donne les actuelles strophes 4 (« Temple du Temps… »), 5 (« Comme le fruit… ») et 9 (« Sais-tu, fausse captive… »). Le début du 4e vers de la strophe 4 a été corrigé : « Je feins » biffé et remplacé par « Et comme »; à la fin du vers, variante au crayon: « j’aspirais le ciel même ». On relève deux autres variantes marginales au crayon, et une hésitation sur l’ordre des strophes.

Le feuillet non chiffré présente les strophes 7 (« L’âme exposée… »), 8 (« O pour moi seul… ») et 6 (« Beau ciel, vrai ciel… ») dans leur forme définitive, mais dans un ordre différent.

Le feuillet 3 donne les strophes 10 à 12 (« Fermé, sacré… », « Chienne splendide… », « Ici venu, … »). Le 2e vers de la strophe 10 a été fortement biffé « Ce [mur?] ici retourne à la lumière » puis corrigé en « Fragment du monde offert à la lumière ». On relève quelques autres variantes et corrections au crayon.

Le feuillet 4 donne les strophes 13 à 15 (« Les morts cachés… » « Tu n’as que moi… », « Ils ont fondu… »), dans leur forme définitive.

Un feuillet 5 présente les strophes 16 (« Les cris aigus… »), 19 (« Pères profonds… ») et 20 (« Amour, peut-être… »); à la fin de la première, Valéry note au crayon « Maigre » (pour insérer l’actuelle strophe 18). La dernière strophe présente plusieurs ratures et corrections; la rédaction du premier vers : « Est-il Amour, impatience, ou haine? » a été en grande partie biffée et corrigée « Est-il Amour, peut-être, ou de moi-même »; au 2e vers, Valéry biffe « profonde » avec deux variantes possibles « si fine » et « secrète »; le 4e vers commençait ainsi: « Je sais », biffé et remplacé par « Qu’importe! ».

L’autre feuillet 5 donne les strophes 16, 19 et 21 (« Zénon, cruel Zénon… »), avec quelques variantes à l’encre non retenues dans la strophe 19.

Le feuillet 6 donne les strophes 17 (« Et vous, grande âme… »), 18 (« Maigre immortalité… ») et à nouveau la strophe 21. La première présente des variantes, notamment pour le 2e vers et l’ordre des 4e et 5e vers. Les deux autres ont trouvé leur forme définitive.

Le feuillet 7 donne les trois dernières strophes du poème, 22 (« Non, non !.. Debout… »), 23 (« Oui ! grande mer… ») et 24 (« Le vent se lève ! … »), avec des ratures et corrections pour les deux premières.

Ces 9 feuillets étaient contenus dans une enveloppe, ici conservée, adressée à Mademoiselle Gobillard et Monsieur et Madame Paul Valéry, 40 rue de Villejust, oblitérée en 1923.

Les feuillets et l'enveloppe sont placés dans un portefeuille de conservation et de présentation s'ouvrant en accordéon, réalisé par l'atelier Devauchelle.

Inspiré par le cimetière de Sète, publié le 1er juin 1920 dans la Nouvelle Revue française, avant une édition en volume en août chez Émile-Paul frères, Le Cimetière marin est le fruit d’une longue maturation, rythmée par la rédaction de versions successives, durant plus de 3 ans.

On connaît une quinzaine de versions autographes du Cimetière marin, la plupart ne présentant qu'une partie des 24 strophes composant le poème dans sa version définitive.

Toutes ces versions, hormis celle-ci et une autre très raturée mais incomplète (ne comprenant au total que 19 strophes) qui figurait dans la collection de Pierre Berès (Le Cabinet des Livres, 4ème vente, 20 juin 2006, lot 152, adjugé 86 744 euros (frais inclus)), sont maintenant conservées par des institutions publiques : au Fonds Valéry de la Bibliothèque nationale, au musée de Sète, au Valéryanum de la Bibliothèque Jacques Doucet et à la Fondation Polak à Utrecht.

La présence de variantes et l'hésitation concernant l'ordre des strophes semble indiquer que ce manuscrit pourrait dater de l'été 1920, entre la publication du poème en revue et celle en volume.

Florence de Lussy, « Charmes », d’après les manuscrits de Paul Valéry, Paris, Lettres Modernes 1990 et Supplément, ibid, 1996, p. 370 – Œuvres complètes I, Paris, 1957, p. 1683)

50 000 €