SIEFERT (Louisa)

Rayons perdus - Rayons perdus avec préface de Charles Asselineau - L'Année républicaine - Les Stoïques - Les Saintes colères - Comédies romanesques

Paris, Lemerre, 1868 (Rayons Perdus), 1869 (Rayons perdus, 3ème ed., L'Année Républicaine), 1970 (Les Stoïques), 1871 (Les Saintes colères) & 1872 (Comédies romanesques)

5 recueils de poésie et un de comédies reliés en 4 volumes, pleins chagrins bleu-roi maroquinés, dos à nerfs décorés et dorés aux petits fers, large dentelle dorée sur les plats avec des médaillons aux coins et un ornement central, double filet doré sur les coupes, dentelle intérieure, tranches dorées sur marbrure, gardes de papier doré, «P 1868», «P 1868», «P 1869» et «P 1872» en queue (reliures uniformes de l’époque), sous chemise et étui modernes en toile bleue, faux-titre, photographie originale, poème autographe, titre, lettre autographe signée, 171 pp. (Rayons Perdus), faux-titre, photographie originale, poème autographe, titre, VIII pp. (Préface), 179 pp. (Rayons Perdus, 3ème éd.), faux-titre, photographie originale, poème autographe, titre, 55 pp., 1 f. n. ch. (table) (L'Année républicaine), faux-titre, poème autographe, titre, 129 pp. (Les Stoïques), 16 pp. (Les Saintes colères), faux-titre, photographie originale, titre, poème autographe, lettre autographe signée de 2 pp., VII pp. (Préface), 222 pp., 1 f. n. ch. (table) (Comédies romanesques)

Les six premiers recueils de poésies et de comédies de l'auteur, enrichis de 6 poèmes autographes signés, de 4 photographies originales d'époque, de 2 lettres autographes signées et de deux envois autographes signés.

Tous ces documents autographes sont adressés à "son ami inconnu", très probablement, Jean-Baptiste Pène d'Asté, qu'elle épousa en 1875.

1. Rayons perdus. 1868, 172 pp.

Édition originale du premier recueil de l'auteure, enrichie :
- d'une photographie originale de l'auteur en tirage d'époque (8,5 x 5,5 cm) contrecollée sur un feuillet blanc,
- d'un poème autographe signé (feuillet plié monté sur onglet), daté du 9 janvier 1869 : "A un ami inconnu / La sympathie est douce et l'amitié charmante, / J'aime leur fleur suave au parfum ingénu. / Comme une violette avec un brin de menthe, / Je vous les donne, ami qui m'êtes inconnu, / Qui venez jusqu'à moi, que je voudrais connaître / Et qui me serez cher et fidèle. peut-être !". et
- d'une lettre manuscrite signée située "Les Ormes, St-Cyr près Lyon" et datée du 15 9bre 69 : "Je ne puis vous écrire qu'un mot, toujours le même, merci ! Votre sympathie m'est douce au coeur, cher ami inconnu, vous êtes pour moi comme un rêve, comme un idéal et cependant c'est bien réellement que je suis votre toute reconnaissante Louisa Siefert".

2. Rayons perdus. Troisième édition achevé d'imprimer le 15 avril 1869.

On y trouve la préface à la seconde édition de Charles Asselineau et 4 poèmes inédits (Le Banc, Page blanche, Voyage et Solitude).

Exemplaire enrichi :

- d'un envoi "à mon ami inconnu, / témoignage de bien vive sympath[ie] / et de profonde reconnaissance / Louisa Siefert. / Les Ormes, 10 mai 1869",
- d'une photographie originale de l'auteur en tirage d'époque (8,7 x 5,7 cm), et
- d'un délicat sonnet autographe signé rédigé sur un feuillet (21 x 13,3 cm) avec ses initiales gravés en haut à droite : "A mon ami inconnu / Ami, je sais bien mal exprimer ma pensée, / Et plus le sentiment qui m'étreint est puissant, / Plus douce la surprise au coeur reconnaissant, / Ou plus chère la main dont la mienne est pressée, / Plus aussi ma voix meurt sur ma lèvre glacée, / Plus s'éteint dans mes yeux le regard languissant, / Et plus, goutte du ciel qui sur l'âme descend, / Se cache pour tomber cette larme versée. / Aujourd'hui toute émue à vous dire merci / Je viens à vous et vous murmure : "Me voici, / Vous-même sur mes traits lisez ce que j'éprouve" / Ainsi le voile tombe et le secret se trouve. / Mais moi, si tel hasard n'était jamais donné, / Saurais-je dire enfin : Je vous ai deviné ? / Louisa Siefert / Les Ormes Octobre 1869".

3. L'Année républicaine. Les Stoïques. Les Saintes colères.

Chaque recueil, en édition originale, est précédé d'un charmant poème autographe adressé à l'ami inconnu :

Le premier rédigé sur papier vergé (17,1 x 11 cm) : "Ami toujours plus inconnu / dont la main généreuse dore / La cage où l'oiseau détenu / Chante la forêt et l'aurore ; / Ami pour moi si prévenu, / Ami dont l'amitié m'honore, / Ami qui n'êtes pas venu / Et que je n'ose attendre encore ; / Ami cher dont je ne sais rien / Qui voulez, par un pur lien / Que mon coeur au vôtre s'unisse ; / Ami que je sens près d'ici / Oh ! laissez, vous criant merci, / Qu'au passage je vous bénisse ! / Louisa Siefert / Les Ormes, 10 mai 1869".

Le second rédigé sur la première page d'un double feuillet avec chiffres gravés en tête : "A Mon ami inconnu, / L'inconnu me fait peur souvent, / Et devant lui j'hésite et rêve, / Comme devant le flot mouvant / Qui dans la nuit et dans le vent, / Vient frapper et mordre la grêve. / Tout un avenir décevant / Est là dans ce flot qui s'élève, / Et c'est lui, le grand arrivant, / L'inconnu ! / Mais soudain en vous ecrivant / Toutes mes craintes ont fait trêve ; / Car pour mon coeur trop peu savant, / Ami, votre emblême vivant / C'est ce mot qu'un sourire achève : L'inconnu ! / Louisa Siefert. / Les Ormes ce 29 mai 1870".

Le dernier rédigé en guise d'envoi sur le faux-titre des Saintes colères : "à l'Inconnu / La malade est morte le soir. Au matin la lettre égarée, / Nouveau coup pour l'âme navrée /Revient qui nous parle d'espoir. / C'est toi que nous veillions naguère / Avant que ton front se courbât, . O France ! et ces vers de combat / Sont publiés après la guerre. / Louisa Siefert. / Les Ormes ce 20 Xbre 71".

Un portrait photographique original en tirage d'époque (9,2 x 5,8 cm) est encarté en-tête du volume.

4. Comédies romanesques.

Édition originale, enrichie :
- d'une photographie originale en tirage d'époque (9 x 5,6 cm),
- de deux poèmes autographes signés : Le premier sur un feuillet : "A Mr mon ami inconnu / Plus on est seul et plus on rêve ; / L'esprit bien clôs devient alors / Un théâtre aux changeants décors / Peignant foyer, chant, ville ou grêve ; / Tout un peuple s'y meut sans trêve / Mélant ses cris et ses accords, / Chaque idée y revêt un corps / Et vit son heure haute ou brêve. / Plus on est triste et plus on fuit / Dans ce doux pays des chimères. / - Plaisirs coupables, éphémères, / Dira-t-on. - Soit ! pourtant la nuit, / Quand tout dort sous les sombres voiles / L'âme s'en va dans les étoiles / Louisa Siefert. / Les Ormes, ce 24 mai 1872"; le second, de deux pages sur un grand feuillet plié (20,2 x 13,6 cm) : "A mon ami inconnu / Ami, que dans mes jours d'épreuve, / J'ai toujours trouvé sur mes pas / Pour que votre bonté s'émeuve / La douleur ne suffit donc pas ? / Vous voulez encore me sourire, / Rapprocher votre coeur du mien / Et d'un dernier noeud, sans mot dire, / Resserrer notre cher lien ? / Merci ! Quelle que fût ma voie / Vous la-suiviez avec douceur, / Si bien que, pour moi, toute joie / Salue en vous son précurseur, / Hier, je vous devais de croire / Au retour de l'espoir enfin ; / A être inconnu dans ma nuit noire / Vous êtiez l'aube d'aujourd'hui. / Votre main à ma main tendue, / Votre sympathique amitié / M'annonçaient la grâce rendue / Et prophétisaient à moitié. / C'est pourquoi sans fin et sans trêve / J'en bénirai le souvenir / Ami qui me futes le rêve / Et le gage de l'avenir / Louisa Siefert. / Les Ormes, ce 17 7bre 74", et
- d'une très belle lettre autographes signée de 3 pages et demi : Pau ce 5 Xbre 1972 / Monsieur mon mystérieux ami, / Quoique Mme Montgolfier / n'ajoute pas un mot de / commentaire à la belle / surprise qu'elle m'envoie / aujourd'hui, je ne crois pas / me tromper en vous disant / merci cette fois encore, et / croyant vous reconnaître dans / ce nouveau présent inconnu. / Me gâterez-vous donc toujours ? / Déjà j'avais le remord de / ne vous avoir point répondu / directement au printemps, lorsque / vous avez bien voulu me / marquer votre souvenir, à / propos de quelques vers, de cette façon tout ensemble si généreuse / et délicate qui n'est qu'à vous. / Et vous redoublez du même, malgré / cette apparente attitude / et dans cet exil lointain / auquel ma triste santé m'a / condamnée vous venez me / chercher, et comme c'est à / vous que j'ai dû les eaux / salutaires l'été dernier , je vous devrai maintenant le / soleil ? Quelle douceur de / coeur est donc la-vôtre que / vous ne pensiez qu'à faire / plaisir ? / Monsieur et cher ami, qui / voulez rester pour moi l'idéal / bien qu'aussi curieuse que / fille d'Eve puisse être, je / ne regrette qu'une chose dans / le secret qu'il nous plait de / garder, c'est de ne pouvoir / affirmer de votre nom les / sentiments que j'ai pour vous. / Mais je serais si désolée d'aller / en ceci contre votre volonté / que je vous prie de me pardonner / même ce mot qui m'a échappé. / oui vous êtes et vous serez / toujours pour moi, ce côté / paternel et charmant de la / vie que les uns appellent hasard/ les autres providence, que je / nomme, moi, l'inconnu. / Et puisque vous êtes si bon / que de sourire parfois à mes / rêves, je veux vous écrire tout / de suite ici, le sonnet d'hier / qui peut-être était un pressentiment / du réveil que vous m'avez fait ce matin : / Par tous chemins semant ma vie, / Vers les larges horizons bleus, / Je vois comme un oiseau frileux / Dont l'aile au gré du vent dévie. / Sans plus de plaisir que d'envie, / Des monts hautains aux flots houleux, / J'erre ainsi loin du lit moëlleux / Au même regret asservie. / Je n'ai jamais que pour le fuir / Touché le seuil où mon désir / S'est senti mourir et renaître. / Je n'ai pourtant jamais perdu / Ce bonheur (le seul vrai peut-être) / de croire au bonheur attendu. / Louisa Siefert".

Somptueux exemplaires de cet ensemble complet des oeuvres poétiques parues du vivant de Louisa Siefert (1845-1877).

Exemplaires offerts à son mari Jean-Baptiste Pène d'Asté et abondamment truffés. Un exemplaire de Méline (Paris, Lemerre, 1876), seul roman de la poétesse, relié à l'identique et avec envoi a été catalogué par la librairie Clagahé de Lyon en 2012.

Cette poétesse lyonnaise, morte de phtisie à 32 ans, a reçu cette louange de Rimbaud, à propos de Rayons perdus : "c'est aussi beau que les plaintes d'Antigone dans Sophocle". "C'est la plus désenchantée des romantiques mais la plus fière et la plus réservée aussi. Sa vie sentimentale fut jonchée de déception. [.] Charles Asselineau devint son ami, lui donna des conseils littéraires, lui parla mariage, puis n'en parla plus. A trente ans, enfin, elle épousait M. Pène [d'Asté]. Elle mourut après deux brèves années de bonheur conjugal. Cette trop longue attente de l'amour lui a inspiré des poèmes déchirants. [.] Admirons Les Rayons perdus et Les Stoïques où le pouvoir de suggérer la désillusion atteint à sa plus haute intensité. [.] Il lui faut [pourtant] à tout prix se raccrocher à une foi, ne pas détruire totalement le sens d'une vie dont elle a tant attendu et qui lui a si peu donné". (J. Moulin, La Poésie féminine XII-XIXe siècle, 1966, pp. 305-306). Elle confie d'ailleurs, dans le sonnet qui conclut la dernière lettre de notre exemplaire : "Je n'ai pourtant jamais perdu / Ce bonheur (le seul vrai peut-être !) / De croire au bonheur attendu".

Dos uniformément passés.

Walch, Anthologie des poètes français I, p. 416 ; Butin, Ces Lyonnaises qui ont marqué leur temps, 2004 ; Marietton, Joséphin Soulary et la pléiade lyonnaise., 1884 ; Planté, Masculin/féminin dans la poésie et les poétiques du XIXe siècle ; Chichmanoff, Étude critique sur les femmes poétiques en France au XIXe siècle, 1910.