BALZAC (Honoré de)

Lettre autographe signée à M. [Charles] de Montalembert, fils

Paris, le 5 juin 1831

Lettre enveloppe pliée en deux, rédigée à l'encre noire sur une page et un quart in-8 (22 x 14 cm), signée en fin (probablement datée par Charles de Montalembert), nom du destinataire et adresse (au bureau de l'Avenir, Paris) manuscrits au verso, cachet de cire

BALZAC PRÉPARE LE LANCEMENT DE LA PEAU DE CHAGRIN

Importante et rare lettre inédite d'Honoré de Balzac à propos de l'Enquête de la politique des deux ministères et de La Peau de Chagrin, adressée le 5 juin 1831 à Charles de Montalembert, homme politique et journaliste, catholique libéral, défenseur des romantiques, qui fut parmi les premiers à saluer La Peau de chagrin, « comme le roman qui a révélé l'énorme besoin de spiritualité de notre époque » et comme « le tableau le plus vrai de la société actuelle, qui ait été encore tracé » (Lettre de Montalembert à Balzac datée du 17 novembre [1831], La Pléiade, Correspondance I, 31-121).

La lettre débute par une réponse aux remerciements reçus de Montalembert concernant l'Enquête de la politique des deux ministères, plaquette que Balzac venait de faire paraître alors qu'il envisageait d'entreprendre une carrière politique : "Permettez moi de vous remercier affectueusement de l'aimable lettre que vous m'avez écrite au sujet de l'envoi de mon Enquête. Elle vous était dûe (sic) comme collaborateur de l'Avenir, mais sans cela, je me serais fait encore un plaisir de l'offrir à un écrivain politique aussi distingué que vous.".

Balzac évoque leur récente rencontre dans le Salon littéraire de Sophie Gay : "Je n'ai pas eu le loisir de vous dire tout cela de vive voix chez Madame Gay le jour de la lecture de Barnave [Jules Janin, à l’instar de nombreux écrivains, était venu lire au salon de Sophie Gay le Barnave qu’il venait de publier] ; mais je me proposais d'aller vous prier de parler de ma brochure dans votre journal. L'Enquête est trop vieille aujourd'hui car les évènements marchent vite en notre siècle à chemin de fer."

Alors que la rédaction de La Peau de Chagrin n'est pas encore achevée, Balzac prépare déjà son lancement : "Dans quelques jours, Monsieur, lorsque j'aurai terminé un ouvrage fort difficile, La Peau de chagrin, j'oserai mettre à contribution votre bonne volonté, si toutefois la santé de Monsieur votre père [Marc René de Montalembert (1777-1831) qui décédera deux semaines plus tard, le 21 juin] se rétablit, tous les amis de la franchise doivent désirer qu'il ne souffre pas. Je ne sais si cette lettre vous trouvera à Paris, et si j'aurai le plaisir de vous voir en vous offrant un exemplaire de mon livre au cas contraire, acceptez ici, Monsieur, mes remerciements ..."

La réponse de Montalembert à Balzac datée du 6 juin 1831 est connue (cf. Balzac, La Pléiade, Correspondance I, 31-43) ainsi que quatre autres lettres échangées dans le courant de l'année 1831. On y apprend que Balzac n'enverra son livre à Montalembert qu'à l'automne (un exemplaire du deuxième tirage augmenté de douze nouvelles écrites entre 1829 et 1831 et d'une introduction de Philarète Chasles). Un article consacré à La Peau de chagrin paraîtra dans L'Avenir en novembre.

Retranscription :

"Monsieur / Permettez moi de vous remercier affectueusement / de l'aimable lettre que vous m'avez écrite au / sujet de l'envoi de mon Enquête. Elle vous était / dûe (sic) comme collaborateur de l'Avenir, mais / sans cela, je me serais fait encore un plaisir / de l'offrir à un écrivain politique aussi / distingué que vous. Je n'ai pas eu le loisir / de vous dire tout cela de vive voix / chez Madame Gay le jour de la lecture de Barnave / ; mais je me proposais d'aller vous prier de parler de ma Brochure / dans votre journal. L'Enquête est trop / vieille aujourd'hui car les évènements marchent vite en notre siècle à / chemin de fer. / Dans quelques jours, Monsieur, lorsque j'aurai / terminé un ouvrage fort difficile, La / Peau de chagrin, j'oserai mettre à contri- / bution votre bonne volonté, si toutes / fois la santé de Monsieur votre père se / rétablit, tous les amis de la franchise / doivent désirer qu'il ne souffre pas. / Je ne sais si cette lettre vous trouvera à / Paris, et si j'aurai le plaisir de vous / voir en vous offrant un exemplaire de / mon livre au cas contraire, acceptez ici, / Monsieur, mes remerciements sincères et / l'assurance de ma haute considération. / V. d. s. [Votre dévoué serviteur]/ de Balzac.

 [d’une autre main :] Ce 5 juin 1831."

[Adresse :] Monsieur de Montalembert, fils / au Bureau de L’Avenir / Paris.

Remerciements à M. Hervé Yon en charge de la publication de la correspondance d'Honoré de Balzac dans La Pléiade.